Restitution des fonds des dictateurs d’Afrique du Nord : un combat perdu d’avance ?
Les révolutions en Afrique du Nord s’accompagnent d’annonces de gels des avoirs des dictateurs Mouammar Khadafi, Hosni Moubarak et Ben Ali. Mais on confond souvent, gel et récupération des avoirs. Les démarches de récupération des biens présumés détournés sont très longues et aboutissent difficilement.
Le blocage des opérations sur les avoirs n’est que la première étape sur la voie de la récupération des biens détournés. Si la dynamique affichée par les gouvernements occidentaux est encourageante pour la récupération des biens détournés, les réalités économiques et géopolitiques le sont moins. Il est en effet impossible de prédire si cette tendance en cours va s’enraciner, en n’oubliant pas que Kadhafi et les anciens présidents tunisien et égyptien, Ben Ali et Hosni Moubarak, ne sont pas les seuls à avoir détourné des ressources. D’autant plus que l’expérience nous montre que les occidentaux ne se décident à agir que quand les auteurs de détournements sont en position de faiblesse sur le plan politique notamment.
Selon certaines estimations les détournements de Ben Ali, Hosni Moubarak et Kadhafi s’élèveraient respectivement à 5, 70 et 100 milliards de dollars US. Ce sont là des ressources financières non négligeables pour ces pays soucieux de leur développement politique, mais aussi économique. Outre les procédures juridiques qui n’aboutissent pas toujours, il sera difficile à ces Etats de récupérer l’intégralité des fonds détournées dont une grande partie se trouve dissimulée par des holdings, des sociétés off-shore ou des fonds d’investissement opaques.
Pour toutes ces raisons, le gouvernement provisoire tunisien a opté pour une action plus radicale. Il a adopté la semaine passée le projet-loi portant sur la confiscation sans compensation, ni décision judiciaire préalable, des biens de 110 proches de l’ancien régime acquis après le coup d’Etat de 1987. L’application de cette décision devrait modifier profondément l’économie tunisienne étant donné l’ampleur avec laquelle le clan Ben Ali –Trabelsi s’était lancé dans le monde des affaires. Par exemple, l’Etat tunisien se retrouvera momentanément en position dominante dans le secteur des communication.